GENERATEUR POIETIQUE : un jeu pour développer son esprit critique !
Via Poietic Generator |
Le problème de la plupart des jeux qui prétendent développer l’autonomie et l’esprit critique des joueurs en situation, c'est qu'ils s’appuient en fait sur des environnements qui cachent des designs très centralisés …le joueur n’a pas accès à la dimension masquée de sa dépendance…il n’en a pas conscience…alors qu’elle impacte pourtant son style de jeu, ses réponses, ses comportements !
Pour moi, un jeu éducatif devrait au contraire amener les joueurs à découvrir la structure dans laquelle ils évoluent et quels sont les processus qu’ils mettent en jeu, à la fois sur le plan individuel et collectif…L’idée est qu’ils puissent ensuite réinvestir cette approche questionnante dans d’autres contextes de vie : quels sont les designs des applications web 2.0 ? quelle différence avec le P2P ? Comment je me situe topologiquement dans ces espaces? puis par extension : quel est le design institutionnel dans lequel j’évolue ? quelle incidence sur mes engagements et mes responsabilités ? etc….l’idéal pour moi est qu’au travers du jeu et de son accompagnement, le joueur apprenne à apprendre via son expérience de jeu et au delà !
Le Générateur Poïétique développé par Olivier Auber est un exemple de jeu qui s’inscrit dans cette approche
http://perspective-numerique.net/wakka.php?wiki=GenerateurPoietique
En voici le descriptif
“Derrière ce nom étrange se cache une expérience collective très simple et très enrichissante pour les enfants de 7 à 77 ans. En fait, ça marche déjà à partir de 3 ans avec accompagnateur.
Il s’agit de dessiner à plusieurs sur une même image. On ne peut pas dessiner partout, chacun dessine sur la surface qui lui est affectée composée de 20 par 20 pixels. On connait des expériences ou chacun peut dessiner partout. Le problème est que c’est le chaos au delà de deux personnes simultanément. Dans le Générateur Poïétique au contraire, un dessin global s’auto organise petit à petit avec des dizaines, des centaines, voire des milliers(*) de participants, sans qu’il soit nécessaire d’imposer préalablement un thème.
Les traces de chacun sont enregistrées au fur et à mesure si bien que l’on peut revoir ensuite toutes les phases d’élaboration du dessin.
Il s’agit moins d’une expérience picturale - ce n’est pas le “beau” qui est visé - qu’une manière de donner à chacun un moyen d’éprouver les mécanismes qui sont à l’oeuvre dans une interaction collective. En particulier le mimétisme joue un grand rôle, et ça se voit, ce qui peut donner ensuite l’occasion de discuter de ce qui se passe dans les cours de récréation ou les marchés financiers ;-) ”
Ce jeu est simple à mettre en oeuvre et il est d’une grande richesse sur le plan pédagogique ; il amène à se questionner sur : comment j’interagis et je construis quelque chose, un dessin, avec les autres, comment par analogie j’apprends avec les autres, comment par ailleurs la visualisation des processus convoqués impacte ma compréhension de l’environnement et mes comportements ! et en quoi aussi cela m’amène à mieux saisir d’autres contextes d’interactions collectives…
Pour aller plus loin, je dirais qu’avec le Générateur Poïétique, le design même du jeu devient matière à apprendre…on opère ici une véritable boucle d’auto-organisation où l’on apprend ET on apprend à apprendre en simultané …
Dans la plupart des jeux cette deuxième boucle de méta-apprentissage n’est pas sollicitée : on se questionne à l’extérieur du jeu mais rarement sur le jeu lui-même et son design.
En tant que méta-jeu http://en.wikipedia.org/wiki/Metagaming, le Générateur Poïétique nous projette dans une dimension d'apprentissage augmenté.
Pour info : Je vais prochainement relancer de nouvelles séances de Générateur Poïétique ! :-))) A suivre donc !
MAJ du 24 novembre 2019
Le titre de ce billet était sans doute mal choisi même si l’argumentation nuance relativement les choses...Sur le GP on vient dessiner à plusieurs, parfois seul(e). Les questionnements autour du GP que j'évoque dans ce billet (2010) ne sont pas systématiques évidemment. Ils dépendent de l'environnement dans lequel se déroule le jeu, de l'état d'esprit des joueurs, de l'accompagnement...Parfois il ne se passe rien de particulier, surtout lorsque des joueurs commencent le jeu avec des préjugés du style "ce jeu est une simple grille de dessin collaboratif qui n'a aucune implication pédagogique possible." A l'inverse, parfois, il se passe quelque chose d'extraordinaire et ce quelque chose questionne singulièrement ceux qui ont la chance de le vivre. Le GP reste une oeuvre d'art à laquelle on décide de prendre part (ou pas) et ce qui émerge ne se décrète pas...Si c'était le cas, ça ne serait probablement pas si extraordinaire, pas si beau et pas si questionnant.
Commentaires